mardi 27 avril 2010

Avoir lieu - matériaux - 1




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Ici, dans la conscience naissante d’une puissance jusqu’alors inconnue, toute la nuit il pense au voyage qu’il vient de décider d’entreprendre. Il en perd le sommeil.








Ici, commence les conséquences d’une action dont le récit n’a pas été entendu. Ici, commence les conséquences d’une action dont le récit n’a pas encore été fait. Ici commence les conséquences d’une action dont le récit ne cesse d’avoir lieu. Ici. Rien ne commence. Ici : les conséquences et les actions sont exposées au fur et à mesure qu’elles sont mises en relation.

Ici : se réalise un récit faisant suite au silence. Ici : un récit prend la parole après la parole tue. Ici : un récit : ouvrant les corps après l’empêchement. Ici un récit : à la fois autopsie et mouvement de libération.

Origines. Fins. Naissances. Révolutions.

Origines = présents.

Fins = encore.

Naissances = [--------].

Révolutions = éternités.

Récits. Origines. Fins. [--------]. Présents. Révolutions. Naissances. Éternités.

Multiplicités.

Encore.







Silence du jour où il naît.

Avant le silence, et après le silence. En même temps silence et avant le silence et après. Encore ailleurs. Récit d’un ailleurs qui n’a ni commencement ni fin. Premier cri au contact de l’air. Dernier souffle avant le suivant. Instant : qui veut tout relier. Instant qui relie tout sans plus avoir à vouloir. Dans la trachée. Premier jour. Premier jour sans cesse. Événement permanent. Voix muette.

Voix muette qui prend la parole + parole en multitude. À la fois dans les corps et entre les corps. Parole multipliée par ce qui, entre les corps, anime l’événement. Voix muette qui prend la parole en tout point de l’espace. Voix muette qui.

Réanime ce qui ne cesse. Se fait chant. Bouleverse les instants. Connaît la durée.

Voix muette dit. Je viens. Jamais je ne cesse. Je suis là : pour que jamais ne cesse. Je suis là. Pour qu’enfin ait lieu le récit dont nul commencement ne saura jamais rendre compte. Je suis là. Pour que vive les corps dans ce qui vit en eux, entre eux, avant, pendant, et après eux.

Je suis là : après la naissance, quand la vie commence.

Je suis là : multitude qui prend corps, et trouve parole. Je déploie la naissance. En même temps : je suis un corps en cendre.







Inscriptions.

J’inscris sur mon corps le récit de chaque jour
J’inscris sur mon corps le nom de chaque lieu
J’inscris sur mon corps le nom des villages et des villes desquels je m’éloigne
J’inscris sur mon corps le nom des villages et des villes vers lesquels je reviens
Je prends la route
Je range bien la maison avant de partir
Je remets tout en place
Je ne veux pas laisser de traces
Je déchire toutes les feuilles
Je les brûle toutes
J’efface les indices signalant mon passage
Je veux : que ce soit vide après mon départ
Je pense : c’était vide avant mon arrivée
Avant mon arrivée : rien
Après mon départ : rien
Je commets fréquemment des erreurs de jugement
Je travaille, patiemment, à ruiner l’idée du jugement

J’inscris sur mon corps le nom d’un autre corps
J’inscris dans mon corps le nom d’un autre corps
Je sais que dans mon corps est inscrit un autre nom
Je sais que dans mon nom est inscrit un autre corps
Je commets, fréquemment, des erreurs de jugement

Je sais que dans mon corps s’inscrit un corps plus vaste que le mien
Je sais que hors mon corps s’inscrit un corps plus vaste que le mien
Je sais que l’inscription est celle d’un temps qui m’a précédé et que je prolonge
Je sais : je commets fréquemment des erreurs de jugement
Je sais : l’inscription est vivante par la seule vie présente
Je travaille, patiemment, à ruiner l’idée du savoir
Je vois les cernes sous mes yeux
Je sens la fatigue
Je pense à l’inscription du temps qui n’en passerait pas par un corps
Je regarde l’enfant

Je pense : j’inscris mon nom dans le nom donné à l’enfant
Je pense : j’inscris le temps dans le corps donné à l’enfant

Je cherche le nom d’un lieu
Je cherche le nom d’un lieu où vivre encore longtemps
Je prends la route

Je revois mon visage encore jeune dans le miroir d’une chambre d’hôtel
Je regarde dans un cahier le tracé maladroit d’une écriture
Je regarde l’enfant
Je prends la route







La maison est calme. L’enfant dort dans la chambre.

La maison est calme. Je tiens l’enfant serré contre moi. Il dort.

Ensemble, nous quittons la maison.

Ensemble nous marchons. Dehors.







La rivière. Les immeubles. Les arbres. Les toits des immeubles. La cime des arbres. Les troncs. Les branches. Les feuilles. Le ciel, bleu. Les terrasses des bars. Les tables en terrasse. Les vélos. Les voitures. Les bateaux accostés. Les oiseaux. Les femmes. Les hommes. Les animaux. Les reflets dans les vitres. Les façades. Les bureaux. Les pavés. Le sol. La pente jusqu’à la rivière. Les trottoirs. Le bitume. Les inscriptions au sol. La rue séparée en plusieurs voies. Le rond point au bout de la ligne droite. L’arrêt de tramway. L’autre côté de la rivière. Les femmes. Les hommes. Qui attendent. Qui marchent. Les femmes. Les hommes. Dans leurs voitures. Assis sur des bancs. Passant devant les immeubles, Entrant dans les bureaux. S’arrêtant. Regardant. Femmes et hommes longeant les rivières, bâtissant leurs maisons, abattant des arbres, sciant des branches, accompagnant des animaux. Femmes et hommes, feuilles dans les branches, animaux dans les rues. Felles et hommes et reflets de leur passage, chacun, chacune, tous, tout.

Précision des jours où le monde est accessible. Précision des images captées par la vue. Précision des contours de chaque être et de chaque chose vus. Précision aiguë de la vue de ces jours où sensation d’accéder par le regard à ce qui entoure.

Ici. Récit d’un accès au monde. Ce matin. Longeant la rivière. Traversant la ville. Soleil vif. Bleu du ciel. Une marche. Jusqu’au bord du fleuve. Traversant la ville, longeant la rivière, m’en éloignant. Rejoignant le fleuve. Marchant sur le cours Saint-Pierre. C’est à Nantes. Sous mes pas : la rivière rejoint le fleuve par le canal souterrain. À droite, là-bas, la tour de la cathédrale. Plus loin, la tour de l’ancienne usine. Face à la tour de l’usine, la tour du château. Plus loin encore, au centre de la ville : menaçante, dérisoire, la tour sombre des affaires.

Marchant dans la ville. La traversant. Rejoignant le bord du fleuve. Longeant le fleuve. Ici : tribunes de l’ancien stade de foot. Ici : destruction partielle des tribunes. Construction d’un nouveau bâtiment : accueil des chercheurs du monde entier. Prestige de la ville. Mémoire du peuple. Façades. Reflets. C’est un matin à Nantes. C’est un départ.

Récit. D’un accès au monde. Annonce du récit d’un accès par lequel les cendres d’un corps dialogue avec une naissance. Je suis en train de naître + je tiens l’enfant serré dans mes bras + je marche vers un corps en cendres = départ.

Histoire d’un accès par un départ. Très simple. Histoire d’un accès par le récit d’une fin. Départ. Départ en cendres. Naissance. Poursuite du vent. Etc.

Je tiens l’enfant serré dans mes bras. Je tiens l’enfant contre moi. Je sens sa respiration. Il dort. Nous quittons la ville.

Abandon nécessaire de l’atteinte de tout but. Accès au monde. Réinvention permanente des corps et des lieux. Écriture permanente d’un récit créateur de nouveaux lieux. Par chaque corps en train de naître. Par chaque corps en cendres. Par chaque corps en marche. Par chaque corps dans chaque espace. Par chaque corps d’espace en espace écrivant le récit, décrivant les lieux, croisant les accès.

Récit. Par la détermination d’un terrain de jeu où se croisent toutes les trajectoires. Multiplicité des trajectoires. Multiplicité des corps. Déplacements. Je suis : en train de naître. Déplacements. Je suis : un corps en cendres. Déplacements. Je dors, je sens la marche dans les vibrations de son corps.

Nous sommes en train de naître.
Nous sommes un corps en cendres.
Nous sommes un corps en marche vers un corps en cendre.
Nous sommes un corps en marche en train de naître.
Nous sommes un corps dans un lieu marchant vers un lieu.

Nous sommes un corps marchant dans un lieu. Nous bouleversons le lieu.
Nous sommes un corps marchant dans un lieu. Nous bouleversons les naissances.
Nous sommes un corps marchant dans un lieu. Nous dispersons les cendres.
Nous marchons.

Et tout commence. Par un terrain de jeu commun. Tout commence par un corps qui accède au terrain de jeu commun. Tout commence par la multiplicité des accès. Tout commence par un corps qui accède au terrain de jeu. Quelque soit l’accès. Tout commence par un corps qui rencontre un autre accès. Tout commence par un corps qui change de terrain de jeu. Tout commence par un corps qui trouve un nouvel accès et change le terrain de jeu. Tout commence par les liens tissés entre les corps qui accèdent. Tout commence par les liens tissés entre les corps qui changent. Tout commence avec la multitude. Tout commence avec : des corps actifs dans la multitude. Tout commence avec le déplacement des accès. Avec le déplacement des corps. Avec le déplacement des multitudes. Tout commence par un territoire que l’on déserte tandis qu’on le parcourt. Tout commence aujourd’hui. 9 novembre 2009.

Nous nous éloignons de la ville. Une voiture s’arrête. La porte s’ouvre. Je monte.







Le conducteur regarde l’enfant. Le conducteur me regarde. Le conducteur demande où nous allons. Je plonge mon regard dans le regard du conducteur et je dis nous allons chercher les cendres d’un homme sans savoir encore où nous allons les répandre. Je dis : nous prévoyons de revenir. L’homme regarde l’enfant. L’homme regarde la route.

Je viens de traverser l’atlantique en solitaire à la rame et je me retrouve dans une forêt. Je viens de traverser l’atlantique en solitaire à la rame et cela m’a pris 60 jours. Je regarde autour de moi les arbres dans la forêt, et dans chaque branche de chacun des arbres je sens la force d’un coup de rame dans l’océan. Je marche dans la forêt pendant 60 jours. J’ai la pénible impression de ne rien apprendre des expériences que je traverse. Quand je sors de la forêt je marche pendant trois jours et je rejoins le fleuve. Dans la forêt, je tue des animaux pour me nourrir. Au bord du fleuve je continue. Dans la forêt, j’abats des arbres pour allumer des feux. Au bord du fleuve je continue. Je mets 60 jours pour traverser l’atlantique. Je mets 60 jours pour sortir de la forêt. Je mets 3 jours pour rejoindre le fleuve. Ensuite, je cesse de compter les jours. Un matin je vois un radeau passer sur le fleuve. Sur le radeau : un survivant et quelques carcasses autour de lui. Le radeau et le survivant et les carcasses disparaissent à l’ouest. Je regarde l’ouest. Je regarde ensuite le nord, puis le sud, puis l’est. Pour finir, je regarde l’eau juste à mes pieds. Je pense à plonger dans l’eau. Je pense à remonter le courant jusqu’à la source. Je pense à plonger dans l’eau et à me laisser dériver jusqu’à l’océan pour cette fois le traverser à la nage. Je pense à bâtir un radeau. Je pense aux carcasses autour de moi. Je pense à abattre un arbre suffisamment géant pour qu’il enjambe le fleuve. Je pense à traverser le fleuve. Voilà, j’en suis là.

La voiture s’arrête. Je descends. La voiture s’éloigne. Nouvelle voiture.

Le conducteur regarde l’enfant. Le conducteur me regarde. Le conducteur demande où nous allons. Je plonge mon regard dans le regard du conducteur et je dis nous remontons à la source en même temps que nous ouvrons nos corps au large. Le conducteur regarde l’enfant. Le conducteur regarde la route.

Mon travail actuel consiste à traduire un récit dont la compréhension qui m’en sépare évoque la distance entre deux corps étrangers.

Je crois que je comprends.

Mon travail actuel consiste à traduire par quelques mouvements de bras les nécessaires ajustements à la trajectoire du véhicule qui présentement nous transporte.

Je crois que je comprends.

Mon travail actuel consiste à traduire en gestes la nécessité de certains déplacements et à développer l’attention à ce qui a lieu pendant les déplacements.

Je crois que je comprends.

Il dit. Non. Pas traduire les mots d’une langue par les mots d’une autre langue. Non. Pas viser le résultat qui viendrait proposer une langue à la place ou à la suite d’une autre langue. Mais bien expérimenter le temps par lequel une langue devient autre, et vivre ce passage. Vivre le temps de ce passage vers autre chose. Vivre et connaître ce temps. Chercher avec lui comment une mémoire se forme. Et dire cette mémoire en même temps que la vivre.

Je crois que je comprends. Vivre : la mémoire au présent d’un corps qui s’ouvre à la conscience. Expérimenter la place du mort : depuis le vivant d’un corps. Sentir en soi certains mouvements ou certains mots prendre formes. Les sentir venir. Les sentir disparaître. Les sentir vibrer. Les sentir présents, confusément, et laisser monter les sensations. Laisser venir le récit de la remontée lente d’une sensation en perpétuelle modification. Laisser les sensations traverser le corps. Et trouver des mots là où il n’y en a pas. Trouver des mots là où un corps sans mot se tient dans le silence. Ressentir : ce qu’il ressent. Dire les mots là où il n’y en a pas. Traduire la sensation de cet univers-là. Une mémoire : qui s’ouvre à la conscience. Une mémoire d’abord sans mot et déjà vivante. Une mémoire en train de naître par la formation de certaines phrases et de certains gestes qui donnent conscience et consistance à un corps. Je traduis, en mots, la sensation de cette naissance. Je traduis, en mots, la sensation de passage que vit un corps quand il parle et s’adresse à un autre corps ; quand il marche et s’approche d’un autre corps. Je traduis la sensation de passage que vit un corps lorsqu’il traduit en mouvement et en mot la sensation sans mot avant le mouvement. Je matérialise à chaque instant l’avancée d’un récit où sensation et pensée se forment et se déploient en même temps : par la naissance d’une mémoire, par la naissance d’un corps, par la naissance d’une parole et d’un mouvement qui se déploient. En même temps.

La voiture s’arrête. Je descends. La voiture s’éloigne. Nouvelle voiture.

Deux jeunes étudiantes à l’avant. Examens de fin d’année. Regardent l’enfant. Demandent et toi tu ferais quoi.

Moi. Je veux être éboueur. Je veux un métier de pauvre = devenir riche. Je veux ramasser ce que vous ne voulez plus. Je veux être éboueur. Je veux avoir des bidons jaunes en plastiques et les remplir de ce que vous ne voulez plus. Tout ce que vous ne voulez plus, j’en ferai de l’or. Je veux. Faire payer le prix de ce trésor. Je veux le revendre. Je veux revendre l’invendable + changer de métier = devenir propriétaire, ouvrir un restaurant, être l’unique serveur : avoir le plaisir d’enfoncer mes doigts dans les fromages au moment de les servir aux clients. Je veux servir les clients avec sur le front une phrase écrite en lettres capitales : à ceux qui croient encore être les maîtres je souhaite un bon appétit. Servir les clients avec un gentil sourire de docilité piétinant l’amour. Servir : avec un nœud papillon en train de se défaire. Être serviteur, et sourire : en faisant le travail. Être à votre service, avec dans les yeux deux images : à droite, celle d’un talon aiguille transperçant un cœur encore battant ; et à gauche, celle d’une voie express traversant le lieu de ta naissance, et dans tout le corps : le froid du vent.

La voiture s’arrête. Je descends. La voiture s’éloigne. Nouvelle voiture.

Le conducteur a la cinquantaine. En 1983, il traverse en clandestin l’océan. Il arrive du Chili. Il passe ses premiers jours en France à Paris dans les couloirs des métros. Sans papier. Sans parler. Sans comprendre la langue. Des compatriotes lui viennent en aide. Il travaille à la plonge dans les cuisines d’un foyer. Aujourd’hui, il a une société du côté de Montpellier. Il s’appelle Ugo. Sa famille vit à Vannes. Quand il parle de sa femme, il dit : l’autre. La voiture s’arrête. Je descends. La voiture s’éloigne. Nouvelle voiture.

Le chauffeur a la cinquantaine. En 1983, il est conducteur de rames de métro à Paris. Aujourd’hui sa fille vit à Nantes. Aujourd’hui va rejoindre sa mère dans la Nièvre. En 1983, la possibilité que lui et Ugo se soient croisés à Paris. La voiture s’arrête. Je descends. La voiture s’éloigne. La nuit tombe. Autoroute. Péage. Bourges. Le froid dans les doigts. Nouvelle voiture.

Jeune conseillère en code du travail. Parole. Chauffage. Le corps se réchauffe. Montluçon. La voiture s’arrête. Je descends. La voiture s’éloigne. La nuit est tombée. Autoroute. Aire de repos. Le froid dans les doigts. Nouvelle voiture. Jeune conseiller commercial en pharmacie. Bonjour. Parole. Chauffage. Le corps se réchauffe.

Des métiers. Qui mettent des femmes et des hommes sur les routes. Des nécessités qui les éloignent. Qui les rapprochent. Désirs qui les rapprochent, les éloignent. Mon enfant.

Pendant vingt ans, je fais un voyage qui me tiens éloigné du lieux où tu vis. Pendant vingt ans, je participe d’une guerre déclenchée par le rapt de la femme d’un ami roi. Je suis un roi. Tu es mon enfant. Pendant vingt ans, tu es un corps sans père. Pendant vingt ans ton corps sans roi se forme un corps par le récit que tu fais de mon voyage.

Clermont-Ferrand. La voiture s’arrête. Je descends. Tu te réveilles. Nous marchons dans les rues de la ville. C’est ici que je suis né. Tu regardes. Tu respires. Nous marchons dans les rues de la ville.







Premièrement.

Je pense à l’infini du temps face à l’innommable. Je pense à l’innommable comme au nom de Dieu maintenant qu’il est mort. Je pense à l’innommable comme au nom de la mort maintenant qu’elle est sans Dieu. Je pense que maintenant nous sommes entre nous sans lui. Je pense que maintenant la mort est entre nous et que nous sommes seuls avec elle. Et je dis. À celles et ceux qui pensent la proximité de Dieu par son néant. À celles et ceux qui pensent son approche par son impossible atteinte. À celles et ceux qui pensent que l’Autre dialogue avec la mort maintenant qu’elle est sans Dieu. À celles et ceux qui pensent que l’Autre est un autre nom pour dire la mort. À celles et ceux qui pensent que l’Autre est un autre nom pour dire son approche. À celles et ceux qui pensent que l’Autre est un autre nom pour dire son impossible atteinte. À celles et ceux qui pensent que l’Autre nomme et porte la mort et la nomme et la porte maintenant qu’elle est sans Dieu et sans plus aucune approche possible. À celles et ceux qui pensent que c’est par l’Autre que nous fréquentons la mort. À celles et ceux qui pensent que c’est par la mort que nous rencontrons l’Autre. À celles et ceux qui pensent que l’Autre n’en sait pas plus long que nous sur la mort. À celles et ceux qui pensent que l’Autre n’existe pas. À celles et ceux qui pensent que croire en Dieu aujourd’hui veut dire accepter une mort bien trempée dans l’inexistant de l’Autre. À celles et ceux qui pensent que l’approche de la mort ne remplace pas la mort de Dieu. À celles et ceux qui pensent à remplacer. À celles et ceux qui pensent avoir tué Dieu. À celles et ceux qui pensent le néant. À celles et ceux qui pensent avoir tué la mort en pensant avoir tué Dieu. À celles et ceux qui n’on pas pensé la mort. À celles et ceux qui n’ont tué ni la mort, ni Dieu, ni le néant. À celles et ceux qui pensent que l’Autre est aujourd’hui le nom d’un crime qui n’a pas eu lieu faute d’avoir été pensé. Je souhaite un bonne appétit.







Deuxièmement.

Je sais qu’à chaque train qui part s’ouvre une distance qui nous sépare. Une distance dont nous ignorons la réalité de la séparation qu’elle va produire. Je sais que dans cette séparation et dans cette distance se déploie ce que nous inscrivons de l’histoire. Je sais que dans cette séparation et dans cette distance : s’inscrivent toutes les histoires. Par le maillage qu’elles tissent entre elles. Par les manières qu’elles ont de s’ignorer, de s’approcher, de vouloir se connaître, de prétendre vouloir se connaître, et d’être honnête plus ou moins en regard de cette prétention. Petite planète. Chers monstres. Vieux mondes. Chère histoire. Chère vieille humanité. Chères vieilles familles. Depuis chaque point de nos vies. Depuis chacun de nos corps. Vivants et morts dialoguent et s’ignorent. Vivants et morts s’éloignent et se rapprochent. Dans la nécessité qu’ils ont de se de voir. Dans la nécessité qu’ils ont de savoir comment ils vivent, ensemble, seuls, comment ils partent, comment ils meurent, ensemble, seuls. Comment ils acceptent et refusent et jusqu’à quelles extrémités refus et acceptations les portent. L’histoire a lieu aujourd’hui.







Troisièmement.

À celles et ceux qui pensent qu’il est intolérable à un corps d’homme d’accueillir le corps de Dieu en son corps sans que son corps en meurt. À celles et ceux qui pensent que certaines et certains accueillent le corps de Dieu en leurs corps sans que leurs corps en meurent. À celles et ceux qui ne parviennent pas à les croire. À celles et ceux qui refusent de les croire. À celles et ceux qui sont prêts à tuer ces corps qui disent accueillir Dieu dans leur corps sans en mourir. À celles et ceux qui pensent qu’il est intolérable à un corps d’homme d’accueillir un corps à venir dans son corps sans en mourir, mais que la femme, elle, le peut. À celles et ceux qui pensent que tout récit est un dialogue avec la mort c’est-à-dire avec le temps c’est-à-dire avec Dieu et son temps mort ou vif. À celles et ceux qui pensent que tout récit n’est pas un dialogue car ni la mort ni le temps ni Dieu mort ou vif ne parle. À celles et ceux qui pensent que ce sont les hommes et les femmes qui parlent. À celles et ceux qui pensent que femmes et hommes se parlent dans la fréquentation de l’approche de la mort. À celles et ceux qui pensent tout cela et qui l’acceptent ou le refusent. Je dis. Que nous ne savons rien. Et je pense. À l’innocence. Je pense à l’innocence qu’enfant je fréquentais, sans la connaître. Je pense à l’innocence que je porte encore en moi sans davantage la connaître. Je pense à l’innocence que tous nous continuons de porter, aujourd’hui qu’elle n’est plus. L’innocence que nous portons comme l’on porte en quelque sorte un cadavre. En même temps qu’elle nous porte et vit encore en chacun de nous. Je pense à l’innocence et à ses deux visages avec lesquels nous dialoguons sans cesse. Innocence que nous n’avons jamais connu. Innocence dont nous ne savons dire qu’une chose : elle a été, elle n’est plus. Innocence pour dire le seul savoir que nous pourrions risquer : celui-ci : nous savons comment elle n’est plus. Et nous : nous sommes là. À ce stade de l’histoire et de nos vies.







Quatrièmement.

L’humanité toute entière demande une fête. L’humanité toute entière. Chaque être humain. Chaque animal. Chaque être vivant. L’humanité toute entière : demande un passage par lequel elle estime être en droit d’être fêté. Quiconque demande : provoque une attente par laquelle il renonce. Il n’y a rien à demander. Cependant, il y a la réalité de cette nécessité : chaque être humain, chaque animal, chaque être vivant : a besoin de vivre un événement qui mette sa vie en fête. Chaque être humain, chaque animal, chaque être vivant : a besoin de sentir un événement se déployer en lui + hors de lui = l’événement. Ce n’est pas par la demande que cette fête viendra. Ce n’est pas par la demande qu’un tel déploiement se fait connaître. L’événement : ne vient pas : il est là. Chaque être humain, chaque animal, chaque être vivant aspire à connaître ce qui est là. Connaître ce qui est là : donne accès à la fête. Connaître ce qui est là : ne tolère aucune attente, aucun rendez-vous pré-établi, aucune demande. Connaître ce qui est là : ignore et la forme et la date et le lieu de l’événement. Chaque être humain. Chaque animal. Chaque être vivant. Chaque particule de l’univers et chaque molécule. Participe de cette connaissance. Participe de cette fête. Et déploie l’événement. Aujourd’hui. Partout. Salut.







Et maintenant. C’est à la fois le premier matin, et la pleine nuit inchangée. Maintenant, une tempête éclate à l’intérieur de mon corps dans laquelle tournoient tous les stades de l’histoire, toutes les strates, toutes les étapes, tous les aigus, tous les graves. Et c’est à la fois juillet 62, juillet 42, septembre 73, et 68, 81, 83, 89, 01, 07, 08, 09, 10, 16, 35, 36, 37. Ce sont les années qui deviennent des chiffres et la mémoire vibrant dans les corps demande autre chose. Ce sont des corps dans un même vacarme qui demandent une mémoire vive. Ce sont des corps vifs, dans les nuits, dans les jours. Ce sont des corps à vifs, dans l’histoire. Ce sont des corps actifs dans les nuits de l’histoire. Ce sont des corps encore assez vifs pour oser regarder la mort en face et lui répondre. Ce sont des corps : qui osent regarder ce qu’ils ne savent pas voir.

Ce sont des corps : qui tiennent tête au pouvoir. Depuis la nuit des temps. Depuis la vieille grotte des cueilleurs, des chasseurs, jusqu’aux maisons des paysans et des ouvriers. Ce sont des corps qui marchent vers une parole. Des corps traçant dans le paysage le récit entêté d’un combat contre les vieilles chaînes blessantes, utiles à l’œuvre des maîtres. Utiles à l’œuvre des consentants. Ce sont des corps traçant dans le paysage, et à même leur peau, le désir entêté d’un amour indéfectible, insistant, résistant. Un amour où libre chacun défait l’aliénation. Un amour où libre chacun tremble de joie à l’idée d’accueillir un autre corps, étranger, d’autres corps étranges. Un amour où libre chacun tremble de terreur et de joie à l’idée de ne plus être le même, et de ne pas s’en satisfaire.

Mains actives pour la pensée. Mains actives pour la terre. Mains actives pour la machine. Ce sont des mains d’amour qui inventent de nouveaux corps. Ce sont des corps : qui s’apprêtent à voir ce qui ne se laisse pas voir. Ils disent : nous sommes prêts à combattre : pour écrire notre histoire, pas la vôtre. Dans notre histoire vous êtes présents. Dans votre histoire nous sommes absents. C’est grammatical.

Je marche dans la nuit. Et je me demande comment s’invente une nouvelle grammaire.

Je marche dans la nuit. Et je vois les champs de blé, de betterave, de maïs, de colza, d’orge, d’avoine. Je marche dans la nuit, et je vois les champs faire leur lumière.
Je marche dans la nuit. Je rejoins le fleuve. Là s’ouvre à moi quantité possibilités. Plonger dans l’eau et me laisser emporter par le courant. Je suis assis sur un banc et je mange. Je marche dans la campagne. Je m’arrête devant un panneau indiquant la distance qui me sépare du fleuve. Je marche le long de la route. Je traverse un pont. Je traverse une rivière. Je m’enfonce dans les champs. Je reviens sur la route. Je contourne un rond point. Je disparais. Je reviens. Je m’assois sur un banc et je mange. Je marche dans le froid du vent.

Je vois deux corps, là-bas : dans la lumière. Et je sais qu’ils s’inventent leur grammaire. Je sais qu’ils s’inventent leur plaisir. Je sais : ils vivent pour la première fois.

Dans cette lumière, quant à moi, je rejoins une armée constituée de cueilleurs, de chasseurs, de paysans et d’ouvriers. Une armée de filles et de fils de cueilleurs, de chasseurs, de paysans d’ouvriers ; ensemble : nous marchons vers un château que nous allons détruire, conquérir, bâtir, nous ne savons pas encore. Nous marchons vers la vieille grotte, vers le château, vers la ferme, vers l’usine, vers la cathédrale. Nous longeons le fleuve. Nous longeons la rivière. Nous quittons le fil du cours de l’eau. Nous empruntons un chemin inédit.

Notre force : tient par cette marche dans laquelle nous savons ne pas avancer seuls. Et en chacun de nous une voix fredonne : parce que nous sommes seuls, chacun, nous ne le sommes plus. En chacun de nous une voix fredonne : c’est par la solitude de chacun qu’une force pour chacun trouve à naître, et qu’ensemble nous pouvons marcher. En chacun de nous, une voix fredonne : c’est parce que chaque force trouve à naître qu’une force nous dépasse et nous porte : au dehors de nous : avec elle, et loin. Nous marchons.

[L’homme tout seul / ce n’est pas bon / Je vais lui faire une aide / comme quelqu’un devant lui]. [Comme quelqu’un].

Et je me récite les noms des grottes, les noms des villages, des hameaux, des villes : Arçon, Aubepierre, Chantelle, Clermont-Ferrand, Chirat, Deneuille, Moutiers, Lyon, Nantes, Rennes, Vallabrègues, Paris, Ussel : pour ne pas aller vers nulle part. Et parce que je marche seul et parce qu’ils sont là, je me récite les noms des hommes et des femmes qui ont vécu dans chacun de ces villages, dans chacun de ces hameaux, dans chacune de ces grottes, dans chacune de ces villes. Je me récite les noms des filles et des fils de cueilleurs, de chasseurs, de paysans, d’ouvriers. Je me récite le nom des maîtres et des maîtresses de chacun de ces lieux. Je vais pour me les dire, un à un. Chaque nom de fille, chaque nom de fils, chaque nom de femme et d’homme, chaque nom de maître et de maîtresse. Je m’arrête avant de commencer.

Il y a. Un intrus dans l’histoire. Parmi ce peuple de cueilleurs, de chasseurs, de paysans, d’ouvriers, un maître se cache sans dire qu’il fait partie des maîtres. Une maîtresse ou un maître se cache et ne règne pas. Je ne sais pas encore dire son histoire. Je sais qu’elle ou il existe, et que l’histoire trace les méandres de son accueil. Je sais que son histoire se mêle à celle d’un peuple d’esclaves. Je sais que son histoire se mêle à celle d’un peuple de libérateurs. Je sais que l’intrus en tant que maître parmi le peuple de cueilleurs, de chasseurs, de paysans, d’ouvriers, aspira à devenir esclave et le devint, aspira à devenir libérateur et je sais que l’histoire est en cours.







Je reprends. Par le silence. Je reprends par le silence des corps. Je reprends par le silence de la terre. Je reprends : pour le silence. Pour tous les corps qui ont gardé le silence. Jusqu’à la mort. J’écris : à leur suite, à leur attention. Et à leur place, oui. Non pas à la place qu’ils occupèrent mais à la place depuis laquelle je vis avec eux aujourd’hui. Écrivant l’histoire avec eux aujourd’hui.







Présent, dans l'effacement. Retenu dans le tranchant. Quelqu'un, aujourd’hui, dans le paysage. Un homme absent dans le paysage. Un homme présent : par le paysage. Par le paysage décrit. Un homme présent : par le paysage vu, entraperçu. Un homme présent par le paysage travaillé. Labeur. Sillons. Ténacité à l’œuvre, de siècle en siècle. Sillons. Terre ensemencée. Terre. Labeur. Ténacité des hommes présents. Aujourd’hui, sillon seul dans la terre : aujourd’hui, quelqu’un dans le paysage. Aujourd’hui quelqu’un ose le mot. Aujourd’hui quelqu’un ose dire le sillon, seul. Ose dire le mot pour continuer de toucher la terre, seule. Pour oser toucher la terre par le mot. Et là creuser, encore. Jusqu’à trouver en son centre : le noyau, le feu. Et là : refaire le jeu. Déplacer le centre. Inventer un autre milieu. Démultiplier les centres. Déranger les milieux. Déclasser l’origine. Désorienter. Inventer : les règles d’un nouveau jeu. Croire : à la possibilité d’un nouveau jeu.







Je longe la rivière. J’arpente les chemins de campagne. Je vois les champs dans la lumière. Je vois les filles et fils de paysans constitués en armée. Je rejoins la rivière. Je vois les fermes qui brûlent. Je vois les fermes et les châteaux en feu. Je longe le fleuve. Je traverse un pont. Je vois les guerres successives. Je marche au bord de la route. Une voiture s’arrête. J’entends les cris de terreur. Je monte dans la voiture. J’entends les cris de joie. Je vois la lumière. Je vois le feu. Je sens dans ma gorge les larmes des corps blessés. Je sens dans ma gorge un cri de plaisir qui envahit le corps. Je vois un rideau blanc très doucement voler devant une fenêtre ouverte. Je vois dans la chambre les corps des amants sans image à offrir au monde. Je suis : la disparition de ce monde. Je suis la connaissance du feu. Je marche dans la campagne. Je longe le fleuve. Je remonte à la source.

Dans l’autre sens. Va dans l’autre sens. Entends-tu.

J’entends la disparition du monde. J’entends le rire de amants. J’entends dans chaque rire, la naissance d’un nouveau corps. J’accompagne la disparition. J’accompagne la naissance.








Cinquièmement.

Écrire aujourd’hui et dans ces conditions le récit de l’invention des règles d’un nouveau jeu : où chaque rédacteur écrit la nécessité de défaire les règles-mêmes dont il a participé de la rédaction. Écrire le récit d’un départ. Dans ces conditions. Écrire le récit de la trahison, de la fidélité, de l’oubli, de l’affirmation faite aujourd’hui à l’aune de la mémoire de chaque jour vécu. Écrire : le récit de chaque jour, jusqu’aux plus sombres où la vie se pensa comme une succession de jours invivables. Écrire jusqu’au plus sombre. Écrire le monde qui s’effondre et vit la réalisation de son abomination. Tu attendais la joie, et c’est l’anéantissement qui vient. Tu attendais la vie, et c’est l’éclat même de sa négation qui touche tous les corps. Écrire le récit de chaque jour, jusqu’au jour où la vie s’écœure de vivre si vivre c’est vivre ça. Écrire le récit de chaque jour, jusqu’à la réconciliation avec les jours, avec tous les jours. Avec la mémoire des jours anéantis. Avec la mémoire des jours de joie. Réconciliation. Mémoire. Récit du jour vivant. Récit des corps vivants. Aujourd’hui. Vivant des corps écrivant le monde qui ne renonce pas. Vivant des corps au combat.

Contre le règne-destruction. Par le vivant de corps réalisant leur puissance : oui.







Si nous trouvons une cohérence à l’histoire – c’est-à-dire si nous l’écrivons – chaque corps qui la traverse accède à sa naissance.

C’est ainsi que peut s’ouvrir un livre. C’est ainsi qu’un livre ouvert peut s’écrire. Il suffit de construire un récit se jouant des liens : les déliant et les gardant vibrant : désaliénés.

Un récit : traçant des liens par lesquels : le livre devient un corps vivant.

Un livre ouvert que chaque lecture réouvre. Un livre ouvert à qui chaque lecture redonne vie.

Un livre : qui serait ce lieu où vibrent nos corps très vivants c’est-à-dire très seuls + ce que nous devenons.







J’écris ces mots le 9 novembre 2009.

J’écris ces mots le 30 janvier 1933.

J’écris ces mots le 20 juin 1789.

Je sais qu’il existe un passage nécessaire par lequel fêter la venue de ceux par qui nous sommes venus.

Je sais qu’il existe un passage par lequel notre monde s’effondre.

Jours négation.

Jours affirmation.

Jours cadavres.

Jours naissances.

Nous savons qu’il existe un passage innommable par lequel notre monde s’effondre et n’est remplacé par rien.

Nous ne savons pas jusqu’où nous sommes capables d’entendre ce que nous dit ce rien.

Nous savons que le monde effondré est encore là bien que remplacé par rien.

Nous savons que le monde effondré est encore là et qu’il est vivant bien que remplacé par rien.

Nous savons qu’au centre du vide il y a une autre fête.

Nous expérimentons la folie de croire en cette fête.

Nous pensons qu’elle ouvre les vies à des corps dispensés de toute nécessité.

Nous émettons des hypothèses démentes.

Nous dépassons les hypothèses.

Nous maintenons la vie en vie.

Nous dépassons la maintenance.

Nous n’attendons plus.

Nous sommes vivants en train de vivre écrivant l’histoire aujourd’hui.







Il suffit d’écrire. Tout est vrai. Il suffit de vivre. Tout est juste. Juste et vrai si les mots écrits laissent place à l’étendu du vivant. Juste et vrai si les jours vécus se risquent dans l’ininscriptible. Dans l’étendue de l’infini. Juste et vrai si jours et mots risquent un récit qui dépassent les corps qui les vivent et les écrivent. Juste et vrai si les corps par les jours et les mots trouvent une voie par laquelle vivre : dans l’étendue : sans commencement : ni fin : éternel par infini. Juste et vrai si jours et mots participent à libérer les corps c’est-à-dire à créer des lieux pour des récits et des vies dont les échos déplacent l’entendement des jours, des mots, des corps, des lieux : défont toute idée de place : et ainsi vivre l’intensité : par laquelle pénétrer le néant. Béance. Ce qui est là. Notre temps. Ne se pense pas seul.







Voulez-vous remplacer le fichier existant par celui-ci. Oui. Chaque jour. Oui. Instance majeure : ne nous arrêtons pas. N’arrêtons pas là.