Nous marchons tous les quatre dans les nouvelles rues de la ville. Dans certaines rues de ce que devient cette ville. Dans sa nouvelle architecture. Nous marchons là où se tenait l’extérieur de la ville. Là où était tenu à l’extérieur de la ville ce qui la constituait et la regardait. Nous marchons là où la ville était une usine. Nous marchons là où la ville était un port. Nous marchons là où la ville avait un cœur extérieur à elle-même. Nous marchons là où la ville poursuit l’effacement de ce qu’était son cœur. Effacement de l’usine. Effacement du port. Effacement de ce que fut ce cœur, extérieur à la ville centrale et à ce qui s’y est toujours tramé. Son pouvoir. Nous marchons et gardons vivant le cœur extérieur. Nous marchons dans l’effacement. Nous inscrivons la persistance. Nous quittons la ville. Nous rejoignons les campagnes. Nous marchons dans l’effacement des lieux. Nous sommes là, bien réels. Nous marchons dans la présence bien réelle de ces lieux. Nous maintenons en vie les cœurs extérieurs. L’usine. Le port. Les campagnes. Nous marchons dans l’architecture nouvelle. Nous marchons dans ces lieux où les rois et les princes n’ont jamais su régner. Nous marchons dans ces lieux où les rois et les princes n’ont jamais été en pouvoir, quelque fut leur pouvoir, malgré tout leur pouvoir, de rendre aimable en rien le règne. Nous marchons dans les immensités et dans les marges. Nous maintenons en vie quelques possibilités pour être. Pas moins. Nous fréquentons les territoires extérieurs. Nous marchons : avec les immensités. Nous marchons : avec celles et ceux qui les peuplent. Nous sommes celles et ceux qui les peuplent. Nos cœurs sont multiples. Nous sommes. Un peuple multiple.
Nous traçons des frontières mouvantes. Par nos marches quotidiennes. Nous traçons des frontières mouvantes qui rendent instables les territoires définis par la seule volonté de règne.
Nous marchons dans l’immensité des territoires extérieurs à la ville. Nous marchons dans l’immensité des territoires extérieurs à la domination. Nous marchons dans la puissance des territoires extérieurs. Nous marchons : à la frontière. Nous traçons les frontières. Nous traçons des frontières mouvantes, par nos marches quotidiennes. Nous traçons des frontières mouvantes qui rendent instables les territoires définis par leur seule volonté de règne. Nous marchons : au cœur de la ville. Nous marchons : là où la puissance est extérieure. Nous éprouvons les intensités d’une certaine puissance, incertaine, mouvante, instable, vivante. Nous marchons. Nous sommes instables et sans volonté de règne.
En marge de l’ordre et des volontés
En marge de l’ordre et dans la durée
Nous sommes
à l’extérieur.
Nous sommes lignes ouvertes
à l’extérieur
Nous sommes lignes en marche
à l’extérieur
Nous sommes en marche
et dans la durée
Nous maintenons
en vie
quelques possibilités
pour être
Considérations dans les rues de cette ville en son hiver.
Considérations depuis ces lieux en leur état.
Quant à ce qu’il en est de l’amour. Et de son inscription dans nos corps. Nous marchons. En marge. Nos cœurs sont multiples
Bâtiments anciens. Bâtiments nouveaux. Activités d’hier. Activités d’aujourd’hui. Activités pour le futur. Nous marchons. Histoires de nos corps traversés. Liens qui perdurent et qui deviennent. Autres. Mouvement de l’histoire en cours. Cœurs multiples. Quant à nos corps. Histoire en cours.
Passerelle
qui traverse le fleuve.
Passerelle
qui rejoint la ville centrale
Derrière nous :
Palais de la justice.
Masse noire.
Antichambre de la punition
Le monde est bien gardé
un autre mot serait à trouver à la place du mot
amour
un autre mot à la place du mot
il cherche
une autre place
à la place du mot
une autre place que celle-ci
où nous avons jusqu’à ce jour
toujours
tous
vécu
toute
la place
est à donner
au vivant
c’est tout
elle sourit
tout
ce qui vient
à la place
de
n’efface
rien
ne remplace
rien
de la puissance
de
ce qu’il voulait
remplacer
nous marchons
en marge de l’ordre et des volontés
tout ce qui vient
à la place
de
ne remplace pas
ne remplacera
jamais
la question n’est pas celle de
la place
nos corps
nos cœurs
ne demandent pas une place
n’en demandent pas
une seule
nos cœurs
nos corps
ne demandent pas
ils marchent
La puissance se réalise par là où rien ne se remplace.
La puissance se réalise par là où ce que nous vivons ne remplace pas.
La puissance se réalise par là où ce que nous vivons ne remplace rien.
ils sourient
elle a froid
Nous sommes là toues les quatre
Nous reprenons la marche
la joie n’est pas toujours flamboyante ; elle peut être vivante, par-dessous.
par-dessus tout : ne donne pas
par-dessous, aux marges, à la frontière : peut donner
Il y a ces nouveaux bâtiments aux matières froides et certains dans lesquels nous aspirons à vivre. Le froid de la matière : notion des plus relatives. Nos corps savent certaines choses.
Nous traversons la passerelle. Nous rejoignons l’appartement. Une boisson chaude. Quelques au revoir. Un coup de téléphone en soirée. Quelques mots encore. Il n’y a pas de premier jour qui tienne, et c'est très bien. Il y a ce jour encore trop grave. Pas seulement. Pas seulement grave. Pense-t-il.
Ici l’aiguë de quelque note se met en lien avec, le grave. Jasmine
Ici quelques légères depuis l’aiguë entrent en vibration, avec. Gaël
Elles sont toutes là, vibrantes, nous le sentons. Marien
Elles sont là et nous faisons vibrer l’expérience avec elles, nous le sentons. Hélène
Aujourd’hui, nous sommes quatre.
Vite allez vite quittons cet hiver,